Le journalisme numérique en quelques points

Au fil des articles de ce blog il n’aura échappé à personne qu’à l’heure actuelle, il n’est plus suffisant d’être un simple rédacteur pour prétendre au statut de journaliste. Dans la continuité des « 5 commandements du journaliste web », voici une liste non exhaustive des aptitudes à avoir pour prétendre au titre de journaliste en ligne, avec en bonus un peu de datavision parce que c’est aussi ça, les nouvelles pratiques journalistiques.

Le nombre de journalistes qui intègrent la blogosphère croît de jour en jour, un phénomène qui s’explique par de nombreuses raisons: plus de liberté dans l’écriture, aucune ligne éditoriale à suivre, une proximité avec le lectorat qui peut réagir instantanément à travers les commentaires et la possibilité de consulter la popularité du blog ou d’un article pour un jour donné. Mais avant de parvenir à ce résultat, encore faut-il maitriser certaines aptitudes comme par exemple savoir corriger une balise html, créer un flux RSS, ajouter des tags à ses articles pour les référencer auprès des moteurs de recherche, insérer du contenu audio ou vidéo pour rendre les articles plus vivants et interactifs…

 En plus d’être capable de collaborer avec les internautes par le biais de Facebook,Twitter, Linked In ou encore Tumblr, le journaliste à l’ère du numérique doit aussi être apte à travailler avec d’autres professionnels. Parmi eux, citons par exemple:

  • les développeurs informatiques qui réalisent les logiciels sur lesquels le journaliste devra travailler
  • les techniciens, qu’ils soient en charge de la photographie, de la prise de son ou de la vidéo
  • les designers qui s’occupent de la conception graphique, des typographies utilisées afin de rendre le site d’information aussi agréable à lire que simple à utiliser
  • les graphistes qui expriment à l’aide de schémas données et autres statistiques pour illustrer les mots du journaliste et les rendre plus ludiques et compréhensibles.

 

Mais tous ces efforts sont bien vains si personne ne peut admirer le résultat final; d’où l’intérêt du « Personal Branding », un anglicisme sympathique qu’on peut traduire par « Savoir se vendre ». Savoir vendre son travail, en particulier (rappelons que le commerce du corps humain est interdit par l’article 16 du code civil).  Pour se faire il faut d’abord créer un produit médiatique spécifique, qui se démarque des autres par son ton, l’angle ou le format adoptés. Grâce aux sites communautaires évoqués plus haut (Facebook, Twitter, LinkedIn…), il suffit d’une publication au journaliste pour porter à la connaissance de tous ses contacts son dernier article publié, une sorte de mégaphone en ligne qui va amplifier la popularité, le nombre  de visites et les éventuels commentaires à propos de ladite publication. Car plus que jamais dans le journalisme, la reconnaissance passe par la visibilité.

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Jeux Olympiques Londres 2012, les nouvelles pratiques au service du sport

Dans 93 jours très exactement, le monde entier aura les yeux rivés sur Londres, capitale organisatrice des Jeux Olympiques 2012. En attendant le grand jour, Alex Balfour, à la tête de New Media pour les Jeux Olympiques et Paralympiques Londres 2012 peaufine sa stratégie pour mettre les nouveaux moyens de communication au service de cet événement sportif mondial.

Qu’on soit passionné de sport ou pas, on a peu de chance d’échapper à l’événement sportif à dimension planétaire. Pour l’édition 2012, les Jeux Olympiques impliquent 205 nations, 15 000 athlètes, 20 000 journalistes et représentants de médias et 7 000 volontaires ; un challenge de taille en terme de communication, dans un paysage médiatique qui a bien changé depuis les derniers Jeux en 2008 à Pékin. En 4 ans, le haut débit a remplacé le dial-up (modem fonctionnant avec une ligne téléphonique), l’accès à la 3G peut se faire à partir de n’importe où et la popularité des réseaux sociaux n’est plus à démontrer.

Le comité New Media en charge de la communication pour la manifestation sportive compte bien mettre à profit ces avancées technologiques; surfant sur cette vague de nouveaux médias, le comité lancera deux applications pour smartphones : l’une répondant au nom de Join In, qui suivra le parcours de la torche olympique et fournira des informations à propos des événements culturels, l’autre intitulée Results et qui donnera, aussi surprenant que cela puisse paraître, les résultats de la compétition en temps réel. Le site internet du comité des jeux London 2012 invite les gens à s’enregistrer pour suivre en temps réel l’actualité de la manifestation sportive. Jusqu’à présent, 4,3 millions de personnes se sont inscrits sur le site mais Alex Balfour espère bien voir les adhésions augmenter à mesure que les Jeux Olympiques approchent. Au menu du site internet tout de fluo vêtu , une description de chaque discipline, une biographie de chaque athlète et bien sûr un calendrier pour ne rien rater . Des photos de Getty, photographe officiel de l’événement seront aussi disponibles en ligne ; aucune vidéo en revanche puisque le diffuseur officiel en a l’exclusivité.

En attendant le début de la manifestation sportive le 27 juillet prochain, les visiteurs du site Getty Images patientent en admirant les photos de Londres et celles des précédents Jeux Olympiques.

Considérant les médias sociaux comme une véritable opportunité pour les Jeux Olympiques, Balfour encourage chacun à partager à travers Facebook et Twitter. « Ce qui est nouveau pour un événement de cette envergure, c’est que les sportifs seront eux aussi actifs sur les réseaux sociaux, explique-t-il. Cela plongera les spectateurs au cœur de la vie de leurs sportifs favoris ». Un bon moyen donc pour recueillir les impressions d’un athlète après un exploit sportif et accéder à des tweets qui entreront peut être dans la posterité. Le comité responsable de la communication a en effet créé un compte dès le 2 février 2009, @London2012 destiné à stimuler l’interaction avec les followers (496 587 au moment où ces lignes sont écrites) et renvoyant régulièrement ces followers sur les comptes d’athlètes participant à la compétition. Le comité, en prise directe avec les amateurs de sport surveillera au plus près les réseaux sociaux afin d’analyser les sujets qui intéressent les internautes et de répondre à leurs attentes. Cette année, les amateurs de sport devraient plus proches que jamais de l’événement.

London2012 met l’interaction avec ses followers au centre de ses préoccupations

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Citizenside, un objectif citoyen sur l’actualité

Avec Citizenside, les citoyens du monde entier se transforment en reporters d’images et apportent leur pierre à l’édifice médiatique, en partageant leurs images liées à l’actualité qu’elle soit politique, culturelle, locale ou juste insolite.


Les premières images du trader de la Société Générale Jérôme Kerviel en garde à vue en février 2008, c’est à Citizenside qu’on les doit. Tout comme la vidéo du couturier John Galliano déclarant sa flamme à Hitler dans un état d’ébriété indéniable à la terrasse d’un café parisien. Le site qui comptait au début de l’année 2012 plus de 70 000 photographes amateurs, professionnels et freelance originaire de plus de 150 pays semble avoir trouvé une formule qui satisfait à la fois les médias et les citoyens-reporters.

La première photo de Jérôme Kerviel, prise par un "citoyen reporter" et diffusée par Citizenside a été largement relayée dans la presse (ci dessus, la Une de Paris Match, le 31 janvier 2008)

L’objectif du site Citizenside est de rassembler la plus grande communauté de reporters amateurs et/ou indépendants, en offrant à chacun la possibilité de partager ses vidéos et ses photos. Véritable agence photographique en ligne, elle présente néanmoins un avantage de taille sur ses concurrentes en offrant une rémunération beaucoup plus élevée que ce que propose les agences traditionnelles  pouvant aller jusqu’à 65% du prix total de leur cliché. Faisant office d’intermédiaire entre les particuliers et les médias de toute la planète, la plateforme se charge de négocier la vente des documents mis en ligne. Tout ce que les reporters d’un jour ont à faire, en plus de se trouver au bon endroit et au bon moment bien sûr, c’est de s’armer de leur appareil photo ou de leur caméra, de publier leurs documents sur le site et d’attendre.

Citizenside propose des photos en prise directe avec l'actualité grâce à ses 70 000 reporters et aux applications pour smartphones dont le site dispose depuis 2009, accélerant la diffusion de l'image.

Créée en 2005 par Matthieu Stefani, Philippe Checinski et Julien Robert sous le nom de Scooplive. l’agence basée à Paris devient Citizenside en 2007 lorsque l’Agence France-Presse (AFP) et la société IAM s’investissent dans la societé. En s’équipant début 2009 d’une application iPhone et Android permettant d’envoyer du contenu directement depuis un smartphone, le site s’est placé à la pointe de la technologie pour s’adapter à des utilisateurs toujours plus mobile, tout en prenant en compte la qualité des photos prises à l’aide de smartphones qui ne cesse d’augmenter. Le côté pratique n’est pas mis à l’index puisque grâce aux onglets « tutoriels » présent sur le site, chacun dispose de conseils généraux ou plus techniques pour réussir de bonnes photos de presse, nettes, bien exposées, tout en variant les angles de vue variés. Même pour les photographes du dimanche dont l’espace de travail se limitait jusqu’alors aux réunions de famille, tout espoir n’est pas perdu.

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D’internet au support papier: le Bélarus fait un pas en arrière pour préserver la liberté de la presse.

La Biélorussie (devenue officiellement La République du Bélarus en 1991) est le pays d’Europe où la liberté de la presse est la moins respectée. Classé 168e sur 179 au classement « La liberté de la presse dans le monde en 2012 » établit par Reporters sans frontières, le pays doit son rang médiocre à son régime politique autoritaire, dernière dictature européenne qui confisque leur liberté aux médias d’information.

La situation du Bélarus reste la plus préoccupante au sein de l'Europe


En 2012, le Bélarus a eu le triste privilège de rejoindre le cercle très fermé des « ennemis d’internet » dont la liste des membres a été dévoilée le 12 mars dernier par Reporters sans frontières. La république parlementaire d’Alexandre Lukachenko rejoint la Chine, la Corée du Nord ou encore Cuba, des pays dans lesquels « problème d’accès, filtrage sévère, traque des cyberdissidents et propagande en ligne » sont fournis avec l’abonnement à internet, selon RSF. Pire, la loi n°317-3 entrée en vigueur le 6 janvier 2012 dans le pays a durci la surveillance du  net en se servant des fournisseurs d’accès à internet et des cybercafés, entres autres, comme indicateurs pour traquer et dénoncer les citoyens adeptes de sites réputés « extrémistes »,en se basant sur leurs historiques et leurs données personnelles (adresse IP, lieu de connexion) scrupuleusement conservés. Le terme « extrémiste » n’étant pas clairement défini, il englobe de ce fait tous les sites d’information et d’opposition au régime. En vertu de cette loi, Charter97 ou Belaruspartisan( avis aux amateurs de biélorusses), deux sites d’information majeurs, sont sous haute surveillance des autorités, promis à une fermeture certaine si leur contenu devenait un peu trop « extrémiste » aux yeux du gouvernement.
Destruction des archives du site, intimidation parfois musclée, la vague de répression qu’a subit Charter97 a forcé sa directrice, Natalia Radzina a quitter le pays début 2011. Dénonçant régulièrement les exactions commises par le gouvernement, celle qui a passé un mois et demi en prison au nom de la liberté d’expression et qui a aujourd’hui trouvé refuge en Lituanie s’insurge : « On n’a pas de médias indépendants, on a que le Net. Les journalistes sont tués et emprisonnés[…] la situation est horrible, ça fait dix-huit ans qu’on souffre de la dictature ».
En avril 2011, c’est le journaliste Andreï Pachobut qui risquait 4 ans de prison ferme pour « diffamation et insulte au président » sur le site Belaruspartisan.org et sur son blog. Finalement relaxé après un procès à huis clos et le passage à tabac des journalistes qui tentaient de le couvrir, Andreï Pachobut ne doit selon lui son salut « qu’aux pressions de l’Union Européenne et de la communauté internationale ». Les journalistes biélorusses ne se laissent pas abattre pour autant et au 21e siècle, alors que le reste du monde passe du papier au web en réinventant le journalisme grâce aux nouvelles technologies, au Bélarus on revient à la presse papier pour échapper à un cyber Big Brother de plus en plus répressif.

L’exemple du Nasha Niva (les amateurs de biélorusses se régalent), le plus ancien journal imprimé en Biélorusse est éloquent. Ce journal indépendant banni par le régime en 2005 s’est appuyé sur la détermination de ses lecteurs et de ses bénévoles pour survivre jusqu’en 2008, date où il a été réhabilité. Si Andrey Skurko, rédacteur en chef adjoint était sceptique quant à la survie du journal pendant ces trois années en toute clandestinité, le miracle a eu lieu grâce aux membres de la rédaction et aux abonnés qui ont distribué les journaux aux particuliers par leurs propres moyens. « C’est un acte risqué témoigne Alexander Lagvinets, l’un des volontaires. De nombreux « livreurs » ont été arrêté pendant leur tournée, mais ça n’a fait que renforcer notre détermination ». Les abonnés du journal se réjouissent car pour beaucoup d’entre eux, comme pour Darya Katkoyskya, le journal tient un rôle important dans leur quotidien et demeure le seul moyen de s’informer à propos de la situation du pays ou des événements politiques. En 2008 le journal a été à nouveau autorisé à la parution. L’auteur de la vidéo déplore les paradoxes du Bélarus qui, d’un côté affiche une attitude plus permissive vis à vis des médias et d’un autre côté, vote des lois qui contrôlent et censurent chaque jour un peu plus la presse. Fait plutôt rassurant, les journaux indépendants et d’opposition survivront aussi longtemps que des citoyens comme Alexander se battront pour que la nation puisse accéder, légalement ou non, à une information objective.

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Anouk Van Gestel, chef de fil des Femmes d’Aujourd’hui

Du haut de ses 98 000 exemplaires vendus chaque semaine et de ses 508 500 lecteurs, l’hebdomadaire Femmes d’Aujourd’hui est numéro 1 de la presse féminine francophone en Belgique. Né en avril 1933, le magazine qui ne fait pas ses 79 ans supplante Marie Claire Belgique, Gael, Flair et Elle Belgique qui s’adressent au même public.
Pour parvenir à ce succès, le magazine a dû évoluer avec son époque,être à l’écoute de son lectorat et mener une opération séduction sans faille qui passe, en 2004, par un changement de logo et de typographie, par davantage de photos publiées et un ton plus léger. Femmes d’Aujourd’hui a aussi décidé de multiplier ses éditions, en proposant un cahier pratique à la fin de chaque numéro, un supplément mensuel de 52 pages, un magazine de jeu avant l’été, un almanach de cuisine à l’automne et un numéro spécial consacré aux fêtes en décembre. Un magazine qui s’impose donc sur tous les tableaux, et la technique a l’air de fonctionner.
A la tête de ce succès on trouve Anouk Van Gestel, rédactrice en chef de Femmes d’Aujourd’hui, une femme « un peu trop curieuse »  qui utilise son statut de journaliste « pour assouvir ce vilain défaut en toute légitimité », d’après ses propres mots. Son rôle :  diriger une équipe de 25 personnes en vue de sortir un magazine chaque semaine. « Il s’agit aussi de veiller aux plannings, aux budgets, à la stratégie, mais aussi de coacher les journalistes et organiser la promotion. » Au milieu de toutes ces missions, Anouk Van Gestel a tout de même trouvé un moment pour répondre à quelques questions.

Anouk Van Gestel, rédactrice en chef de l’hebdomadaire Femmes d’Aujourd’hui.

Tania Messaoudi: Quelles sont les attentes, actuellement, en terme de presse féminine?
Anouk Van Gestel: La lectrice de Femmes d’Aujourd’hui est une femme curieuse, positive, qui a une vie de famille tout en étant professionnellement active. Elle est intéressée par tout ce qui peut améliorer son quotidien, lui faciliter la vie et lui permettre de faire le lien entre rêve et réalité. Elle est concernée, elle fait des choix réfléchis en veillant à son bien-être et à celui de son entourage. L’hebdomadaire s’adresse aux femmes actives entre 25 et 54 ans, appartenant aux groupes sociaux 1-4.Il aborde tous les aspects de la vie quotidienne: mode, beauté, cuisine, santé, déco, tourisme, jardinage, psycho, éducation des enfants…

T.M: En quoi la presse féminine que l’on connait aujourd’hui a changé par rapport à celle d’il y a 20 ans?
A.VG: La presse féminine évolue en parallèle avec la situation des femmes. Elle se veut le relais informatif sur l’égalité entre hommes et femmes en mêlant aspects pratiques de la vie au quotidien et réalités économiques et professionnelles. A l’heure actuelle la presse féminine est aussi une ouverture sur le monde et sort peu à peu la femme de son rôle de ménagère. Oui, nous continuons à nous occuper de nos proches, mais aussi de nous-mêmes.

T.M: Les hommes ont ils leur place dans le lectorat de l’hebdomadaire?
A.VG: Tout à fait, d’ailleurs 27% du lectorat de Femmes d’Aujourd’hui sont des hommes. Particulièrement parce que le magazine est familial et « traîne » sur la table de salon, mais aussi parce que les hommes le consultent pour les jeux, les programmes télé et… les recettes de cuisine.

T.M: Quel rapport entretenez vous avec les nouvelles pratiques journalistiques et quel usage en faites vous?
A.VG: La société Sanoma Media est très sensible à l’évolution des technologies et le magazine suit les tendances. Femmes d’Aujourd’hui a un site Internet, et une application pour tablettes va bientôt faire son apparition. Le magazine ne cesse d’évoluer et de se renouveler. Tout est possible et envisageable. Voilà pourquoi les années qui suivent seront très certainement passionnantes.

Merci à Anouk Van Gestel pour sa disponibilité.

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Live twitting: l’info polyphonique et en direct.

Les adeptes de l’information en direct sur Twitter sont de plus en plus nombreux, rapportant au commun des twittos¹ un concert, une exposition, un meeting politique ou un fait divers dont ils sont témoins . Le phénomène ne date pas d’hier puisque dès 2009, de nombreuses émissions de télé-réalité sont suivies, commentées,« live-twittées ». En ces temps de campagne présidentielle, la pratique s’applique aux émissions politiques, aux débats et autres meetings des candidats.

A chaque diffusion de l’émission « Des paroles et des actes » c’est systématique, l’hashtag² #DPDA arrive en tête des tendances sur Twitter au grand dam du sacro-saint #JustinBieber. De manière plus ou moins pertinente, l’hashtag est utilisé par ceux qui suivent l’émission et la commente en direct, de manière sérieuse ou un peu plus légère.

Toujours est il que le phénomène prend de l’ampleur et présente de nombreux intérêts pour s’informer en direct tout en bénéficiant d’une palette de points de vue qui s’accordent, qui s’opposent, et qui permettent au twittos, puisque c’est leur nom, de se forger leur propre opinion.
Pour ceux qui n’ont pas la télévision où ne se trouvent pas devant leur poste au moment de leur émission, Twitter reste une alternative qui leur permet de suivre tout ce qui se dit dans leur programme sans en rater une miette, avec en prime des commentaires sur la cravate d’untel et le tic de langage de l’autre. Un aspect qui séduit les twittos probablement par son aspect fédérateur justement. On allume la télévision, on s’identifie sur twitter et on expose son ressenti à chaud, on s’emporte, on débat, comme on le ferait entre amis.
Les journalistes présents sur twitter qui s’adonnent au live tweet permettent à leurs followers de décrypter l’information qui leur est donnée, agissant comme des décodeurs d’un jargon qu’on ne comprend parfois pas ou d’une langue de bois que notre candeur n’avait pas forcément détecté. Certains analysent aussi la parole politique en renvoyant à du contenu, que ce soit une vidéo antérieure qui contredit l’information ou un lien vers un site qui corrobore les données énoncées.

Bruno Roger-Petit, chroniqueur politique pour le Nouvel Observateur, retweete un sondage en lien direct avec #DPDA.

Cependant, pour s’informer grâce aux live tweets, il n’est pas nécessaire d’attendre qu’une émission télévisée fasse le buzz ; ainsi du 6 au 9 mars 2012, le live tweet de Gil Juwu a été suivi par plusieurs centaines de twittos. Ce sans papier placé en centre de rétention administrative a profité des deux heures par jour où il avait son téléphone portable pour faire le récit, en direct et en 140 caractères maximum, d’un environnemment mal connu du public, de son arrestation à sa libération.

Pendant les deux heures quotidiennes qui lui étaient imparties et durant 4 jours, Gil Juwu a live-tweeté a propos de sa condition de sans papier en centre de rétention.

Pendant les deux heures quotidiennes qui lui étaient imparties et durant 4 jours, Gil Juwu a live-tweeté a propos de sa condition de sans papier en centre de rétention.

Dans un tout autre registre mais tout en restant dans l’information, le Stade de France lance via son compte twitter une opération visant à recruter des lives tweeter officiels, qui couvriront les prochaines rencontres de rugby. Match oblige, se sont deux équipes qui couvriront le 31 mars la rencontre qui opposera Le Stade Français Paris au Stade Toulousain.

@Lolymount, membre de l'équipe ST (stade Toulousain, selon toute vraisemblance) fait la promotion de l'hashtag #TeamST devant le stade pour attirer les tweetos férus d'ovalie.

La seule contrainte, c’est qu’il faut trouver du temps et se rendre disponible pour live tweeter, parfois pendant plusieurs heures d’affilées. Heureusement, les Pro Tweeters sont là pour s’atteler à cette lourde tâche. Les pro tweeters, comme leur nom l’indique, sont des twittos professionnels spécialistes du réseau social qui utilisent la plateforme comme média de distribution. Et ils sont payés pour ça. Car sur une plateforme aussi massive que twitter qui accueille chaque jour 50 à 100 millions de tweets (les chiffres fluctuent en fonction de la coiffure de Justin Bieber), mettre en valeur un tweet et le faire sortir du lot, c’est tout un métier.
Selon Glenn Le Santo, payé pour tweeter, le pro-tweeting est une pratique partie pour durer qui demande d’être succint dans son discours et d’avoir une force créative pour créer des titres, des phrases d’accroches, des slogans qui auront un impact sur les followers³ . Pour être efficace, il faut aussi être capable d’écouter et de tweeter simultanément, d’extraire rapidement le meilleur du contenu. Si le rythme de l’événement est lent, le rôle du pro-tweetos est de garder quoi qu’il en soit un rythme soutenu de tweets pour ne pas perdre son lectorat, et doit donc se montrer créatif. Tout le monde peut tweeter,  ; mais tweeter de manière efficace, impactante, pertinente n’est pas donné à tout le monde. Les prestations des tweetos professionnels sont primordiales dans le succès d’un évènement ou d’une conférence ; le fait qu’on en parle où qu’on les oublie aussitôt qu’ils sont apparus dépend en grande partie d’eux, résume Glenn Le Santo. Une perspective d’avenir pour les journalistes qui devront aussi devenir des pros de la com’ pour « vendre » leur info?

Lexique à l’usage des non initiés :
¹Tweetos : utilisateur de la plateforme Twitter qui envoie des « tweets », message brefs de 140 caractères maximum.
²Hashtag : sujet attribué à un message, précedé d’un #. En cliquant dessus, le site affiche tous les tweets comprenant le même hashtag et établit un classement des sujets les plus tweetés (trending topics), facilitant le suivi d’une conversation.
³ Follower : personne qui suit votre compte et a donc accès à vos tweets et re-tweets.

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Yo,Periodista: le journalisme citoyen qui vient du sud.

Depuis la création de ce blog, différentes « nouvelles pratiques journalistiques » ont été évoquées, qu’il s’agisse de data journalism, de web TV ou d’applications Facebook. Des pratiques tournées vers l’avenir et développées au Royaume Uni, en Allemagne, en Belgique ou encore aux Pays Bas…mais pas une seule fois les pays du sud de l’Europe n’ont été mentionnés. Ces pays ne sont pourtant pas en reste et s’adaptent eux aussi aux nouvelles tendances du journalisme; c’est le cas par exemple de l’Espagne et du quotidien généraliste El País qui s’est ouvert au journalisme citoyen avec la section « Yo, Periodista » (« Moi, Journaliste ») qui met les lecteurs à contribution et leur permet de publier des articles, des photos et des vidéos. Le site d’information n’a d’ailleurs pas attendu que le succès du journalisme participatif se confirme chez ses voisins européens puisqu’il fait parti des premiers à tenter l’expérience en avril 2007, deux semaines avant le très français Rue89. En Espagne, c’est même le premier média national à ouvrir un espace d’informations en ligne rédigées par les lecteurs, pour les lecteurs.

El País, c’est le journal le plus vendu en Espagne et le second site internet d’information national après El Mundo. Décrit comme l’un des 20 meilleurs titres au monde par Le Courrier International, El País est donc une institution. Après avoir décidé en avril 2006 d’offrir à son lectorat 24horas un journal PDF d’une dizaine de pages gratuit et actualisé en permanence, le titre ibérique a à nouveau enrichi son offre en 2007 pour se rapprocher de son lectorat en instaurant « Yo,Periodista ».

Chaque article publié sur le média citoyen est signé "Moi", suivi du nom de son auteur. Une manière de souligner que chacun à sa manière, avec ses mots, apporte sa pierre à l'édifice "Yo Periodista".

Dans les faits, « Yo, periodista » permet à chaque citoyen majeur et ayant une information à partager, de la porter à la connaissance de tous, à n’importe quel moment. Les citoyens sont soumis aux mêmes règles d’impartialité que les journalistes qui collaborent à El País; les articles doivent transmettre une information objective, sans être le vecteur d’une opinion personnelle. Chacun peut s’exprimer à travers les différentes rubriques mises en place, entre autres: accidents, manifestations, environnement, international, santé, sports, culture, et en s’appuyant sur plusieurs supports parmi lesquels la photo, la vidéo ou encore les documents audios. Le contenu peut être envoyé directement par le biais d’internet ou par texto. Les informations doivent être sûres, sans porter atteinte à l’honneur d’un tiers; des critères dûment vérifiés par une équipe de journalistes. Des règles en somme similaires à celles rencontrées sur tous les sites de journalisme citoyen parmi lesquels El País s’élève comme un précurseur.

"Le journalisme citoyen augmente tandis que les nouvelles manquent de protagonistes". Faut il craindre, comme le relève avec humour l'illustrateur, qu'une fois tous les citoyens passés du côté de la rédaction, il ne reste plus personne pour faire l'actualité?

L’Espagne n’est pas un cas de figure à part puisqu’en Italie aussi, le site Youreporter.it offre une tribune au journalisme citoyen depuis quatre ans. La preuve s’il en fallait une que les nouvelles pratiques journalistiques conquièrent l’Europe du nord au sud sans se soucier des frontières.

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First News: une Web TV pour informer les plus jeunes.

First News, le 1er site britannique d’information dédié aux jeunes de 7 à 14 ans a créé sa propre web TV en 2011 pour compléter son offre d’information destinée à la jeunesse et permettre aux enfants de mieux comprendre l’actualité.

Une interview des acteurs de Harry Potter, un reportage sur la ville de Sydney ou un sondage à propos du meilleur joueur de foot de la semaine : les thèmes ressemblent à ce qu’on peut retrouver sur n’importe quelle web TV d’information, sauf qu’ici le public visé a entre 10 et 15 ans. Nicky Cox, directrice de First News, entend bien exploiter une faille de la BBC qui ne propose pas de programmes pour les adolescents et pré-adolescents qui s’intéressent à l’actualité. Pour palier au problème, le site First News né en 2006, leader en matière d’information jeunesse et qui compte plus d’un million de jeunes lecteurs chaque semaine a lancé sa web TV en janvier 2011 . Celle-ci propose de nombreux reportages sur des sujets variés comme le sport, les loisirs, la culture, le voyage… Un bulletin d’information d’une heure est aussi diffusé chaque mardi, pour suivre l’actualité nationale et internationale.

En plus de son bulletin d'information hebdomadaire,First News propose des dizaines de reportages sur des sujets divers, du sport à...la cuisine.

Cependant, même si le public visé est jeune, ce n’est pas une raison pour censurer l’information si elle est trop violente ou trop complexe. « Tout comme le journal papier, l’émission n’élude pas les sujets controversés comme la guerre ou le racisme précise Nicky Cox, nous tenons à expliquer clairement les choses à nos jeunes spectateurs pour qu’ils comprennent mieux le monde qui les entoure». Chaque information est replacée dans son contexte pour permettre une meilleure compréhension et de nombreux graphiques sont utilisés pour rendre les faits plus ludiques. En mêlant les sujets sérieux et les thèmes un peu plus légers, en variant la longueur des reportages, First News TV entend attirer les jeunes devant leurs écrans d’ordinateur.

Une initiative intéressante quand on sait qu’en Grande Bretagne, les enfants passent en moyenne 4h30 par jour devant un écran de télévision ou d’ordinateur¹. Un temps qu’il vaut mieux employer à s’informer plutôt qu’à regarder Bob l’éponge. D’autant que les enfants en 2012, plus encore que leurs parents, ont une approche intuitive d’internet ; une web TV semble donc être l’outil idéal pour capter leur attention. Un outil qui a pour vocation de familiariser les  jeunes avec l’actualité et le monde qui les entoure, mais aussi d’entretenir leur curiosité en espérant qu’elle perdure jusqu’à l’âge adulte. La web TV à destination des enfants ressemble à un pari sur l’avenir, pour forger les spectateurs de l’information de demain.

¹: source: MailOnline – Cliquez ici pour plus d’informations.

Eleftherotypia: les employés prennent le pouvoir

Depuis le mercredi 15 février, un journal supplémentaire vient remplir les kiosques des marchands de journaux grecs. Un journal en apparence ordinaire, qui privilégie une information complète mais qui recèle une particularité de taille: le journal « Les Travailleurs à Eleftherotypia » est entièrement rédigé et édité par ses employés. Journalistes, techniciens, nettoyeuses, concierges, chacun a relevé ses manches pour recourir à l’injustice qui les touchait.

Pour mieux comprendre la situation il faut remonter au mois d’août dernier. La Grèce pâtit particulièrement de la crise économique qui touche l’Europe, et de nombreuses entreprises sont en grande difficulté financière. C’est le cas d’Eleftherotypia, l’un des plus prestigieux quotidiens grecs. Le patron cesse de payer ses 800 employés et demande l’application de l’article 99 du code des mises en faillite pour se protéger de ses créanciers, mais surtout de ses salariés à qui il doit au total 7 millions d’euros. Face à cette situation, les employés du quotidiens entrent en grève le 22 décembre 2011; en parallèle ils décident de mener plusieurs actions en justice bien sûr, pour récupérer leur dû, mais ils refusent de se laisser abattre et créent leur propre journal, diffusé dans tout le pays et vendu 30 centimes de moins que les autres titres (soit 1€ au lieu d’1€30).
Les travailleurs et travailleuses d’Eleftherotypia sont soutenus par un mouvement de solidarité des diverses collectivités, mais aussi de citoyens isolés qui font des dons en argent ou en espèce (en offrant de la nourriture, des couvertures etc). L’équipe avance donc vers une entreprise autogerée, en éditant leur propre journal et en soutenant leur grève grâce à l’argent de sa vente.Grâce à l’édition de ce journal. Un doux parfum de clandestinité régnait dans l’atelier où le journal a été réalisé, et les méthodes de la direction en apprenant l’entreprise d’édition de ses employés font vaguement penser à celles d’une mafia de la presse (si une telle mafia existe, ce qui serait surprenant). Chauffage coupé, système employé par les rédacteurs pour écrire leurs articles fermé, accès à l’atelier condamné… Débordant de ressources, les travailleurs d’Eleftherotypia ont donc imprimé leur journal dans une entreprise étrangère à l’entreprise, avec la bénédiction des syndicats des salariés de la presse.

"Les travailleurs d'Eleftherotypia sont de retour - Le journal des rédacteurs est ici! Mercredi 15 février 2012" annonce l'affiche placardée chez tous les marchands de journaux.

La direction a peur, menace de recourir à des actions en justice, à des licenciements mais l’équipe de grévistes ne plie pas, forte du soutien du public grec qui attendait la parution de son journal avec grand intérêt et a submergé les journalistes de messages pour les encourager à éditer seuls le journal. En effet en Grèce, médias et marchés sont couplés, ce qui rend la réalité grecque pour le moins opaque. Sans ce climat consensuel, avec plus d’indépendance, le peuple grec se serait peut être révolté plus tôt  afin de renverser une politique catastrophique.
A l’heure de la dictature des créanciers, les employés d’Eleftherotypia souhaitent incarner « l’exemple lumineux d’une information totalement différente », en tenant bon face au patronat et aux barons des médias. Ici ce ne sont pas les nouvelles technologiques qui sont mises à l’honneur mais le courage et l’abnégation de toute une équipe pour faire face à une crise profonde auxquels elle a du s’adapter. Une nouvelle pratique journalistique qui devrait s’étendre à d’autres journaux, dans d’autres pays si la crise persiste.

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Les nouvelles pratiques journalistiques vues par les Belges

Je suis étudiante en journalisme et il y a 6 mois encore, les termes de  data journalism , réalité augmentée, serious game ou encore pureplayer ne faisaient pas parti de mon vocabulaire. Pire encore, je n’ai pas de tablette électronique, pas d’Iphone mais si quelqu’un se pose la question j’ai l’eau courante et l’électricité depuis peu, merci. Effectuant mon stage à Wavre, dans l’édition Brabant Wallonne du journal l’Avenir, je me suis penchée sur les liens qu’entretenaient les belges avec les nouvelles pratiques journalistiques. Profitant d’une journée chaude et ensoleillée dont la Belgique a le secret, j’ai interrogé plusieurs personnes à propos de la manière dont ils s’informaient, où, à quelle fréquence, sur quel(s) support(s)… Au total 24 personnes ont accepté de répondre à mes questions ; des jeunes, des moins jeunes, hommes, femmes, adolescents, actifs, étudiants ou retraités, un panel assez diversifié pour avoir une petite idée du rapport des belges à l’information, 2.0 ou pas.

Sur ces 24 personnes, toutes ont affirmé s’informer grâce à la télévision, à la radio et à la presse papier au moins une fois par semaine, les trois quarts d’entre eux consultant les informations au quotidien. Quand on aborde l’information en ligne en revanche, même en élargissant le thème à l’information sportive, culturelle ou musicale, les statistiques sont moins encourageantes : seulement 8 personnes, soit 33% de notre panel, déclarent s’informer régulièrement par le biais d’internet. Chose plus surprenante, 5 personnes accordent moins de crédibilité à un article publié sur internet qu’à un article publié dans la presse papier. « Dans le journal, on est sûr que les articles sont écrits par des journalistes. Sur internet, on sait jamais trop » résume Pascal, un homme « qui a le bel âge (rires)(estimé par mes soins à 45 ans) » Pour les 14 personnes disposant d’un smartphone, les applications téléchargées sont surtout dédiées à la retouche photo, au téléchargement de musique, à la consultation d’horaires de transports, aux jeux…mais assez peu d’applications développées par les médias.

Enfin, en ce qui concerne les nouvelles pratiques que sont les pure player ou le data journalism, j’ai l’impression de parler chinois et je me sens un peu seule, là, sous la pluie, avec mon calepin. « Les serious game, c’est les jeux vidéos réalistes en 3D? » tente tout de même Dominique. Presque. Seule la web TV est familière à plus de 50% des personnes interrogées, même si pour Alexis, 23 ans « je ne la regarde pas trop, le temps pour que la vidéo charge est souvent trop long », « la qualité n’est pas géniale » d’après Sofiane, 17 ans ou encore « c’est compliqué, et il faut souvent s’inscrire au site pour consulter les vidéos en ligne, ça me décourage » si l’on en croit Dana, 32 ans.

Je n’aurai pas la prétention d’affirmer que ce rapide sondage reflète la manière de s’informer de tout un pays. Toujours est il que le bilan pour les nouvelles pratiques journalistiques n’est pas franchement glorieux. Comment expliquer ce manque de succès ? Ces pratiques seraient-elles encore réservées à une « élite » à la pointe de la technologie ? Le néo journalisme fonctionnerait il en circuit fermé, alimenté par une minorité, pour une minorité ? Comment « vulgariser » ces outils pour les rendre accessibles à tous, sans que l’âge ne soit un obstacle à leur utilisation? Autant de questions que les nouvelles pratiques et leurs développeurs devront tenter de résoudre pour s’assurer de leur succès.

Ha, et une dernière statistique pour la route : sur les 24 personnes interrogées, seule une a accepté de se faire photographier. La voici :

Merci à Valérie et rappelons que fumer tue.

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